Un hommage à KARASIRA Aimable par Aliane Isimbi
Je ne suis pas politicienne.
Je veux seulement partager avec vous la souffrance d’un homme, un orphelin enfant qui avait réussi à s’en sortir, mais qui se retrouve détenu injustement au Rwanda à cause de ses idées qui plaident pour la vérité, l’unité, l’amour et la réconciliation. Le cas de Karasira n’est isolé au Rwanda. Kizito Mihigo nous a déjà quitté, Niyomugabo n’est plus de ce monde également.
Quant à Ntamuhanga, est ce qu’il respire encore ? Bahati où est tu ?
Idamange est ce que tu seras condamnée pour ton dévouement aux plus démunis ? Notre mère Teresa !
Ils ont en commun d’être des orphelins de génocide. Ils sont si généreux avec un cœur en or.
Pour eux, tous les Rwandais sont égaux quel que soit leur ethnie et sont des enfants de Dieu avant d’être Rwandais. Ils demandent un traitement égal et équitable de tous les Rwandais sans distinction ethnique et social. Ils sont remplis d’humanité.
Pour eux, il n’y a pas de vraie réconciliation sans la vérité. Malheureusement, Karasira et Idamange croupissent en prison au Rwanda aujourd’hui à cause de leur humanité. Kizito a été assassiné ou Bahati et Niyomugabo ont été forcés à la disparition. Ntamuhanga detenu illégalement au Mozambique et maintenu incommunicado.
Les idoles de la jeunesse au Gondwana aujourd’hui en prison pour avoir exprimé leurs pensées
Dans un monde idéal, ils auraient reçu des prix Nobels. Karasira aurait eu son propre laboratoire de recherche, un laboratoire nec plus ultra, il se serait marié et je suis sûre que sa femme lui aurait reproché d’être trop au service des autres et de pas leur consacré du temps. Je suis d’autant plus attristée car Karasira nous a dit souvent qu’il est hors de question pour lui de se marier et fonder une famille tant qu’il serait au Rwanda surtout à cause de la tragédie familiale qu’il a connue et il ne veut pas imposer la même souffrance qu’il vit à ses anges innocents qui n’auront pas demandé à venir au monde dans un enfer qui aurait été leur quotidien. Qui peut le blâmer pour cela ? Il ferait un père parfait dont chaque enfant serait fier!
Kizito aurait eu de beaux enfants et sa maison aurait été égaillé de joie et de bonheur avec des chants de louange avec des voix magnifiques de ses petits princes et princesses. La beauté physique de sa femme et sa générosité auraient rendu son foyer plus heureux encore. Pendant quelques instants, il m’arrive de rêver de cet avenir merveilleux que l’on leur a volé et privé.
Niyomugabo : écrivain, forcé à la disparition par le FPR depuis 2014 Mihigo : Chanteur assassiné par le FPR en février 2020 Ntamuhanga : journaliste emprisonné au Rwanda en 2014 par le FPR et détenu incommunicado au Mozambique à la demande du FPR en 2021!
Pourquoi tant de mal ? pourquoi tuez-vous et emprisonnez ces princes et princesses de cœur ?
Karasira a dit à Shyaka qu’il ne faut pas pleurer dans les moments difficiles pourtant il m’arrive de pleurer quand je pense à tout le mal que le système politique et la mauvaise gouvernance au Rwanda lui ont fait et à sa chère famille.
Karasira, que tes êtres chers continuent de reposer en paix.
Je me sens dépassée par la cruauté de l’homme. Les génocides commis au Rwanda, c’est la plus grande honte mondiale. Tristesse et découragement m’envahissent. Tu n’aurais pas dû naître dans ce mauvais pays maudit qu’est le Rwanda, un pays si beau mais trop de sang y a coulé et cela continue. Cette tâche rouge salisse cette beauté naturelle.
C’est mon dernier hommage à toi mais tu restes dans mes pensées tous les jours et j’implore le ciel pour que tu sois libéré au plus vite. Tu n’as tué, ni volé personne. Ton seul crime est d’avoir dit la vérité.
Pourquoi l’être humain est si méchant, comment peut -on faire du mal à un orphelin? Vouloir le tuer pour la deuxième fois ?
Le chemin de croix de Karasira:
Ses parents ont été soupçonnés d’être des espions du FPR dans les années 90 après l’attaque du FPR, ils ont été rejetés par leurs voisins qui se sont donnés à cœur joie à délabrer le jardin familial. Se sentant menacée et en insécurité, la famille a dû déménager par peur que le pire n’arrive. Pire qui arrivant quelques années plus tard par lorsque le FPR, pourtant censé avoir arrêté le génocide, a tué les parents appartenant à l’ethnie tutsie de Karasira, son petit frère et sa sœur et le laissant dépourvu et abandonné à lui-même.
Son petit frère Aimé, qui a survécu avec lui en a gardé des séquelles et troubles psychologiques irréversibles. Grandir sans sa mère et son père, lui qui n’avait que quatre ans l’ont privé d’un accompagnement affectif, émotionnel et soutien dont tout enfant a besoin. Aimé n’est pas mort physiquement mais il semble être détruit psychologiquement à tout jamais et vit dans la plus grande peur qui s’est intensifiée depuis que son grand frère KARASIRA Aimable qui représente à la fois la figure paternelle et maternelle qu’il a perdues a été emprisonné injustement.
Encore une fois, Aimé se retrouve seul au monde et orphelin pour la deuxième fois
Mais Dieu n’oublie pas ses enfants surtout les orphelins.
Rejet social et professionnel, emprisonnement illégal pour le faire taire.
Karasira est un orphelin, un activiste, juste et humble de cœur et plein d’humanité. Il y a quelque chose de rare dans ces victimes du génocide au Rwanda en 1994 non instrumentalisés par le FPR : ils sont pleins d’amour et sont sans rancune. Ils ont compris que tous les politiciens sont tous les mêmes, il vaut mieux s’en éloigner et vivre en paix et en harmonie avec ses compatriotes, voisins, la diaspora qu’ils soit des réfugiés politiques ou économique. Karasira dit souvent que personne ne peut être l’ennemi de son pays natal ou d’adoption. Les gens sont seulement contre le mauvais système politique de gouvernance.
Les politiciens ne pensent qu’à leurs propres intérêts et sont champions de promesses non tenues. Que du bla bla comme le dit Tiken Jah et le petit peuple en paye le plus lourd.
Il a pu étudier grâce à sa motivation et est devenu professeur d’informatique à l’université nationale du Rwanda. Il n’a reçu aucun soutien quelconque pour ses études. Il a toujours été, depuis la période scolaire, dans le monde professionnel et social jusqu’à aujourd’hui, victime de la discrimination que subissent les survivants de victimes du FPR qui a assassiné sa famille. Seul au monde, il se réfugia alors dans l’écriture des chansons et fut rappeur. Beaucoup le connaissent sur le surnom de professor nigga avec un style particulier.
Malheureusement, il fut renvoyé de son poste de professeur à l’université au Rwanda à cause de sa liberté de penser sur sa chaîne YouTube qui a pour objectif d’informer le peuple sur la vérité de l’Histoire du Rwanda et chercher du soutien financier aux plus démunis tout en contribuant à la construction de l’unité du peuple rwandais fondée sur la vérité.
Du fait d’avoir été victime de deux systèmes politiques [celui du MRND et celui du FPR], cela lui a permis de comprendre et de donner la valeur à l’autre sans différenciation ethnique et d’être conscient que la division ethnique est mise en place pour diviser et manipuler le peuple.
Karasira n’est pas un politicien, il n’a aucune affiliation politique. C’est plutôt un grand penseur libre. Le Rwanda a la chance de l’avoir. Avec son franc parler, il critique sans ménager mais de façon constructive le FPR, l’ancien régime et l’opposition qui travaille en exil aujourd’hui. Il déteste les inégalités, l’injustice, le mensonge et l’hypocrisie.
Ses critiques s’accompagnent de plans d’action d’amélioration. Il fait partie de rares Rwandais dont le Rwanda n’aura plus jamais encore. Nous sommes fiers et reconnaissants envers Dieu de l’avoir au Rwanda. Qui sait peut-être notre futur Mandela.
C’est aussi un grand artiste.
Je vous fais découvrir et partager une de ses chansons que je ne cesse d’écouter depuis ce weekend bien que certains d’entre vous la connaissent déjà: » Gondwana ».
Ses chansons sont parfois philosophiques et remplies d’une intelligence incroyable.
Cette chanson a été écrite et chantée par Karasira lui-même. On peut saisir son humanité et son amour dans cette voix si douce et si tendre.
Bien que les systèmes politiques au Rwanda l’aient dépouillé et volé ce que l’on a de plus cher au monde: ses parents, frères et sœurs, bien qu’il soit aujourd’hui détenu au Rwanda par le système politique en place qui veut le faire taire, le système considère en effet notre apôtre de la vérité KARASIRA Aimable comme une menace contre leur abus de pouvoir, l’aliénation et l’exploitation du peuple, Karasira reconnaît pourtant qu’il y a quelques progrès positifs mais que tout n’est pas si rose aux pays de Milles collines :
Bienvenus au Gondwana (traduction en français)
Un pays qui n’existe pas
Un pays imaginaire
Un pays imaginé par Karasira
Refrain
Gondwana, Gondwana
Gondwana tu es incroyable
Gondwana Gondwana Gondwana
Tout y est unique au monde (2X le refrain)
La plupart des habitants du Gondwana sont malheureux, seulement une petite minorité est épanouie.
Être contre le système, c’est commettre un sacrilège
Au Gondawana, l’Histoire est écrite par ceux qui ont pris le pouvoir par les armes.
(2X le refrain)
Au Gondwana, les lois ne sont pas respectées,
Seuls les ordres sont respectés,
Tout est basé sur le mensonge
Seulement le mensonge.
Au Gondwana, chacun est espion de l’autre
Chacun surveille l’autre.
(2X le refrain)
Au Gondwana, les droits de l’Homme sont un rêve,
Et la démocratie est aussi un rêve,
Les enlèvements sont un jeu banal,
Les injustices sont aussi un jeu banal,
Au Gondwana, il y en a qui se servent sans jamais être rassasiés,
Ils mangeront même le fruit défendu.
(2X le refrain)
Bienvenus au Gondwana,
Un pays qui n’existe
Qui est dans mon imagination
Oh par Karasira
Pour Karasira un grand travail de réconciliation reste à faire, il voit les inégalités sociales comme une menace dangereuse qu’il ne faut pas négliger et qui pourrait provoquer le soulèvement du peuple exploité et que cela fera encore le sang couler.
Son plus grand crime est d’avoir révélé au monde que le système politique en place aujourd’hui au Rwanda a assassiné ses parents, son frere et sa sœur.
Aliane Isimbi