La graine CECYDAR – l’héritage de Daphrose et Cyprien Rugamba

Le CECYDAR est un centre qui accueille les jeunes garçons vivants dans la rue au Rwanda. Il a été fondé par Cyprien et Daphrose Rugamba et porte leurs noms, le Centre Cyprien & Daphrose Rugamba « le CECYDAR ». Le couple est connu au Rwanda et a été tué en 1994 en laissant à la nation plusieurs œuvres : leurs chansons, la Communauté de l’Emmanuel du Rwanda et le CECYDAR. Le contenu de cet article est tiré en grande partie du site internet du Centre complété par d’autres recherches.

Le couple Rugamba

Cyprien Rugamba est né en 1935 et a épousé en 1965 Daphrose Mukansanga, née en 1944. Cyprien Rugamba est connu pour avoir eu un tempérament entier, le couple a vécu ensemble jusqu’au 07 avril 1994, jour de leur mort. Ils avaient eu 10 enfants et 6 d’entre eux ont été tués avec eux dans le génocide contre les Tutsi au Rwanda en 1994.
Le début de leur mariage ne fut pas un long fleuve tranquille. Cyprien Rugamba avait fait deux années de séminaire et avait poursuivi les études en histoire au Burundi et en Belgique. Il était une figure célèbre du Rwanda : « Compositeur, poète et chorégraphe renommé, concepteur du Musée des Beaux Arts et de la Culture Rwandaise, directeur de l’Institut National de Recherche Scientifique, Cyprien Rugamba est une personnalité de premier plan, très connu de tous les Rwandais ». Daphrose était enseignante et avait une grande foi en Dieu. Leur couple a connu des difficultés et a fini par se séparer quelques mois notamment à cause des infidélités de Cyprien. Si Daphrose priait beaucoup, Cyprien avait perdu sa foi en Dieu. cela affectait sa femme « Cyprien, homme public d’une grande finesse artistique dont on lui connaît de nombreuses œuvres (compositions, chants, danses), a fait beaucoup souffrir sa femme. Malgré tout, Daphrose n’a pas cessé de rester dans l’espérance et de prier. »

En 1982, Cyprien est tombé gravement malade et a retrouvé miraculeusement la santé après un passage au sanctuaire de Kibeho, il aurait attribué sa guérison « A la grande foi et aux prières de sa femme ». Un an avant, en 1981 la vierge Marie était apparue à Kibeho. Avec la guérison, Cyprien a retrouvé la foi en Dieu et a effectué une conversion « radicale et profonde », «Il se tourne vers le Dieu qu’il a tant rejeté pour l’accueillir de nouveau dans sa vie, en union avec sa femme. Le couple devient uni et rayonnant. L’amour qu’ils avaient l’un pour l’autre devient contagieux et source de vie pour de nombreuses personnes qui croisent leur chemin. »

Une des chansons de Cyprien Rugamba, dans cette chanson il chante l’amour des autres que Dieu nous a légué.

En 1990, ils ont importé de la France et fondé la communauté de l’Emmanuel au Rwanda. La communauté de l’Emmanuel est un groupe de prière fondé en 1972, la spiritualité proposée aux membres repose notamment sur l’adoration eucharistique, la compassion et l’évangélisation. Ils étaient « Devenus un couple débordant d’amour, de tendresse, de délicatesse et de connivence », Cyprien avait refusé de s’engager en politique, affirmant être du « parti de Jésus ». Il avait dénoncé les appels à la violence entre les Hutu et les Tutsi, et son engagement pacifiste avait fait de lui et de sa famille, les cibles des radicaux aux idées extrémistes. C’est ainsi que le 07 avril 1994 il a été tué, avec sa femme et leurs six enfants.

En 1992, Cyprien et Daphrose ont été touchés par « Les conditions misérables des enfants vivants dans la rue ainsi que par l’esprit vif et le caractère leader de ces enfants pourtant en survie », Cyprien était convaincu que «Les enfants des rues peuvent devenir la fierté de la société Rwandaise » et avec sa femme ils ont créé une structure pour les accueillir, ce nouveau projet est devenu un projet de compassion de la communauté de l’Emmanuel du Rwanda. Au départ le centre portait de nom de « Fidesco Rwanda », et aujourd’hui il porte le nom de « CECYDAR ».

La graine CECYDAR

Fondée en 1992 par Daphrose et Cyprien Rugamba, le centre CECYDAR a connu des difficultés aux pages sombres de l’histoire rwandaise « En 1994, lorsqu’éclate le génocide, le petit centre d’accueil des enfants des rues fondé deux ans plus tôt est déserté. Les enfants repartent dans les rues, tout est à refaire. ». Après la guerre et le génocide il y avait beaucoup d’enfants qui vivaient dans la rue, quelques membres de la Communauté de l’Emmanuel ont alors repris le dossier, ils ont mis en place Fidesco, une ONG, agréée par le ministère des français des affaire étrangères, de solidarité internationale qui envoie chaque année une centaine de volontaires dans une quarantaine des pays. C’est cette structure qui héberge le Centre qui porte le nom de ses membres fondateurs. « Entre 1995 et 2005, le CECYDAR replace plus de 3 000 enfants dans leur famille ».

De la rue au centre

Le parcours d’un enfant dans le Centre commence par la rencontre et la préparation. Le Centre commence par aller à la rencontre des enfants dans la rue pour les écouter et les préparer à vivre une vie avec des règles, dans ce cadre l’enfant doit se sentir écouté «Pour cela, l’enfant doit sentir qu’il vient d’arriver dans un cadre structuré, où il existe des règles qui sont appliquées, et où le non-respect de ces règles est sanctionné. S’il sent que les adultes qui l’entourent sont avant tout là pour lui donner de l’amour et de l’attention » ainsi le lien de confiance va pouvoir s’établir. Aussi chaque enfant qui vient au Centre, le fait sur la base du volontariat : « Ils doivent être prêts à venir au centre d’eux-mêmes, avec leur propre volonté de s’en sortir ». Les enfants arrivent au Centre par groupe pour faciliter l’intégration et selon une date qu’ils ont choisie, les autres enfants du Centre participent activement à l’accueil des nouveaux « Dès leur arrivée, ils sont lavés, soignés, nourris, habillés, accueillis selon un protocole bien établi ».

La réhabilitation

L’enfant qui a perdu l’estime de soi dans la rue est valorisé au centre, le CECYDAR se base sur la foi catholique de ses fondateurs pour donner du sens à la vie des enfants souvent fragilisés : « La plupart des enfants ont subi des violences inouïes tant intellectuelles, physiques, psychiques, spirituelles que sociales ».

Le Centre travaille sur cinq axes :

Le développement physique

• Arrêter les drogues et l’alcool
• Prendre soin de soi (pommade, massage, douche, habit propre)
• Prendre soin de sa santé (soins médicaux)
• Se dépenser, faire du sport
• Manger équilibré et à heure fixe
• Apprendre la propreté (ménage, lessive, vaisselle)
• Cultiver, organiser un petit jardin, aider les ouvriers du marais
• S’occuper des animaux de la ferme (vaches, lapins et poules)

Le développement psychologique

• Ici, il s’agit de changer des pensées négatives en pensées positives
• Être écouté individuellement (entretien individuel)
• Partager ses souffrances en s’appuyant les uns sur les autres (thérapie de groupe)
• Ecouter des formations pour comprendre le bon comportement (causeries éducatives)
• Partager son histoire, son anamnèse familiale, professionnelle et événementielle
Le développement Intellectuel
• Se remettre à niveau dans des classes de Catch up
• Recevoir des formations de base pour se débrouiller (bricolage, cuisine, couture, culture)
• Être stimulé par les nouvelles technologies (Ipad notamment)
• Trouver le goût de la lecture (bibliothèque).
• Jouer en stimulant les facultés de réflexion (memory, puzzles, igisoro, jeux de dames, etc.)

Le développement social

• S’habiller correctement tous les jours et porter un uniforme les jours d’école
• Respecter l’autorité, obéir
• Reprendre confiance en soi et confiance en les grandes personnes.
• Développer le souci de l’autre, la bienveillance
• Apprendre à jouer en équipe et à faire des jeux de société

Le développement spirituel

Il est important ici de préciser que le CECYDAR accueille les enfants sans distinction de religion

• Prière quotidienne
• Se mettre chaque matin sous le regard de Dieu
• Elever vers le ciel toutes les souffrances, les colères et les supplications
• Elever également vers le ciel une prière de remerciements
• Prendre conscience du bien et du mal à travers la lecture de la parole de Dieu
• Messe quotidienne
• Possibilité de préparer un sacrement (Baptême, Communion, Confirmation).
Le centre fait aussi un travail de réinsertion des enfants dans la société, le retour à l’école, l’accompagnement des enfants dans leurs familles et au besoin le renforcement des capacités des familles. Les enfants sont accompagnés au-delà de leur séjour dans le centre.

Témoignages des « amasonga »

« « Un amasonga est un enfant qui est passé par le Cecydar depuis sa création en 1992. Il a réussi, ou pas, son ascension sociale. Avec les autres, il s’est battu pour sortir de sa situation a priori inextricable. Il est la pointe de la flèche. Il est en « avant-plan », il entraîne tous les autres vers la bonne direction ».

Noël Ndagijimana
« Orphelin de père et de mère depuis 2007, j’ai vécu dans le centre entre 2009 et 2011 avant d’être réunifié. Le CECYDAR a continué à me prêter main forte surtout en ce qui concerne les frais de scolarisation. Originaire de Nyamata, j’ai déjà terminé mes études secondaires en Garden Technical Secondary School. Je remercie vivement le CECYDAR, il m’aide beaucoup. Les conseils que j’ai reçus me permettront de bâtir ma vie future. J’aimerais continuer mes études universitaires mais je n’ai pas de moyens. Entre temps, j’ai fait une formation en mécanique automobile pour pouvoir subvenir à mes besoins les plus élémentaires ».

Jean Claude Sendama
« Je suis né dans le district de Gasabo, dans la ville de Kigali. J’ai vécu au centre en 1998 et 2013. J’étais un enfant difficile. J’ai quitté le Centre à maintes reprises, cependant les éducateurs faisaient tout pour me retrouver et me ramener à l’école. Je suis actuellement diplômé dans la section Math, Chimie et Physique. Le CECYDAR m’a vraiment aidé à faire la formation en électro mécanique, ce qui m’aide à gagner mon pain. Mais je souhaite cependant continuer mes études ».

Pour aller plus loin vous pouvez :

– Découvrir l’intégralité du site internet du CECYDAR (notamment les témoignages des autres enfants) : https://www.cecydar.org/.
– Faire un don financier au Centre
– Pour les croyants, soutenir le processus de la béatification de Cyprien et Daphrose Rugamba en récitant cette prière : « « Père saint, Nous te prions pour la béatification des serviteurs de Dieu Cyprien et Daphrose. Donne-nous d’avoir toujours, comme eux, un zèle incessant pour l’adoration, un cœur brûlant d’amour pour toi, une compassion agissante pour tous ceux qui souffrent. Aide-nous à nous donner sans compter au service de l’évangélisation des familles et des pauvres. En communion avec Cyprien et Daphrose, nous te confions spécialement les couples qui rencontrent des difficultés conjugales et les personnes qui peinent à pardonner à leurs ennemis et nous te demandons de faire de nous des instruments de paix. Par l’intercession des serviteurs de Dieu, nous osons te demander, selon ta volonté, la grâce de (exprimer une prière concrète) Seigneur, accorde-nous la paix et la grâce qu’avec foi nous te demandons. Amen ». »

Alice Mutikeys

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