Janvier 2018, impossible de passer à côté du scandale du garçon noir portant un pull avec l’inscription « Singe le plus cool de la jungle »
On peut se demander comment et qui a pu valider cette publicité ? Cela semble évident que « singes » est l’insulte ultime que tous les racistes utilisent pour qualifier les noirs, H&M savait pertinemment que cela allait créer une mauvaise polémique.
J’écris ce billet non pas pour crier au scandale, mais prendre du recul et essayer de saisir ces phénomènes.
Dans le même genre, fin 2014, la communauté noire s’insurgea contre le spectacle Exhibit B de Brett Bailey. Le concept de ce spectacle était reproduire un zoo humain à l’image des zoos humain du 20eme siècle dans lesquels les noirs étaient exposés en cage et les blancs venaient les voir. Notons qu’à cette époque, l’homme noir est assimilé à des singes et jugé inférieur à l’homme blanc.
Fin 2014 toute la classe politique et le milieu culturel parisien trouva que la communauté noire sur réagissait. Ils dépensèrent de l’énergie pour expliquer le but et le vrai message du spectacle : dénoncer le racisme en mettant mal à l’aise le spectateur.
Pour ma part, je dois avouer que le simple fait qu’en 2014 l’on puisse remettre des noirs en cages et payer pour aller les voir a provoqué une grande colère en moi. Comme si l’histoire des noirs et leur souffrance ne compte pas. Jusqu’ à présent je ne peux pas comprendre aussi comment cela peut contribuer à dénoncer le racisme.
Il y a eu aussi, en 2017 la publicité de Dove : dans une vidéo, on y aperçoit une femme noire qui devient blanche après une douche (tout est sous-entendu et dans l’interprétation). Là encore la communauté noire réagit fortement et Dove finira par présenter ses excuses.
L’histoire étant une éternelle répétition le milieu intellectuel parisien expliqua que DOVE a fait une erreur en s’excusant. En effet l’extrait de la vidéo ne faisant pas justice à la vidéo complète. Toute la vidéo montre effectivement une succession des femmes qui se transforment en d’autres femmes. Le message de la publicité étant que le gel douche Dove est fait pour toutes les femmes. Encore une fois les noirs n’ont pas compris le message.
Ce qui est dérangeant dans tous ces scandales, c’est cette position que certains peuvent prendre : faire de la pédagogie auprès des noirs pour qu’ils « comprennent » le vrai message.
Dans un monde où l’argent est maitre, où la concurrence est rude et où tout marche à la vitesse 2.0, il me semble que les marketeurs aient bien compris que la provocation paye. C’est sûr que tout le monde a entendu parle de ces publicités, d’ailleurs au passage, cela leur donne une exposition médiatique gratuite.
Taper sur la communauté noire (qui est peut être minoritaire dans leur clientèle) est un risque mesuré. Détrompons-nous dans leurs services marketing, ils doivent mesurer les risques avant de lancer une campagne publicitaire. Ils savent que le pouvoir public laissera faire et qu’ils ne risquent aucune sanction.
Le vrai message est là : dans un pays comme la France, les sujets comme l’esclavage, la colonisation, le racisme sont systématiquement minimisés. Pour reformuler l’impact de ces sujets sur les populations qui les ont subi ou qui les subissent est minimisé.
L’humour est supposée faire rire, si une personne fait une blague à une autre et que l’autre est blessé ou ne rit pas, on peut juste en déduire que soit c’est un humour déplacé ou une mauvaise blague. En aucun cas, on ne pourra argue que l’autre à un mauvais sens de l’humour.
Quant à la liberté de l’expression (supposée menacée dans l’histoire du zoo humain), on ne peut pas s’empêcher de faire le parallèle avec le peuple juif, personne ne pourra un jour s’aventure à faire un spectacle reproduisant les chambres à gaz dans un but artistique…. Mais reproduire les zoos humain est accepté au nom de l’art.
Pour finir, je pense que l’on doit nous laisser (nous les noirs) définir ce qui est juste, blessant ou bon pour nous. Accepter que nous sommes leurs semblables et renoncer à penser à notre place. Je reste convaincu que seul un noir sait ce qui peut ou ne pas le blesser.
Alice Mutikeys