Le 24 aout 2020, l’historien belge Filip Reyntjens supportait le mouvement #BlackLivesMatter via son compte Twitter : « Je supporte absolument le mouvement #BlackLivesMatter, mais n’oublions pas que durant ces 50 dernières années le plus grand nombre de vies de noirs a été ôte par les autres noirs ».

La thèse de M Reyntjens est discutable lorsque l’on connait la part des les grandes puissances au travers de la géopolitique et du néocolonialisme dans les guerres et massacres qui sévissent en Afrique, en particulier dans la région des grands lacs africains. Ce fait lui a été rappelé par Marcellin Mutuyimana : « N’oublions pas non plus le rôle que les néocolonialistes jouent aujourd’hui pour alimenter les conflits africains. Il y a assez de blâme pour tout le monde. Mais la plus grande responsabilité incombe à nous, les Africains nous refusons constamment de grandir ».

Personne ne peut comprendre la mouche qui a piqué Richard Sezibera car ce 26 octobre 2020 il a voulu détourner la discussion en s’en prenant à l’historien belge sur Twitter. Il a répondu à M Reyntjens en lui reprochant de faire l’apologie du racisme : « Cet homme sait-il que le Silence est d’or ? faire l’apologie du racisme, même avec la casuistique, c’est tellement du passé ».

Ce faisant il a tendu le bâton pour se faire battre car l’on lui a rappelé que lui-même faisait partie de ces noirs qui ont joué un rôle dans les massacres des vies des noirs ces 50 dernières années. Cela a été l’histoire de l’arroseur arrosé car M Reyntjens ne s’est pas empêché de lui faire savoir qu’il est la preuve vivante que « le silence est d’or » : « M Sezibera est la preuve vivante que le silence est d’or. Quel est le rapport avec le racisme ? Mais je comprends sa réaction : sa propre organisation, le FPR-Inkotanyi a massacré des centaines de milliers de civils noirs innocents ». Peut-on lire sur son compte Twitter.

Sezibera semble avoir effacé de sa mémoire la tragédie des grottes de Nyakimana, il a en effet répondu à M Reyntjens que : « Ce dans quoi vous vous engagez n’est pas un débat mais une tentative pauvre pour défendre le racisme. C’est vraiment odieux. Quant aux caves de de Nyakinama (en réalité Nyakimana) ou ailleurs au Rwanda pourquoi devrais-je en discuter avec M Reyntjens ? Il n’a pas été…ou ce n’est pas son affaire, malgré les mensonges colportés. »

M Sezibera devrait savoir que ce qui est vraiment odieux est le fait qu’il n’ait pas été traduit, lui ainsi que tous ceux qui ont été impliqués dans les crimes de masse qui ont endeuillé le Rwanda et la République démocratique du Congo, en justice. Il peut prétendre aujourd’hui n’être qu’un diplomate (voir sa page Wikipedia) mais cela ne va pas effacer son passé militaire comme l’on peut le voir dans cet extrait de sa biographie[1] : « Richard Sezibera est un homme politique rwandais né en 1964. Il a grandi au Burundi, puis en Ouganda où il a fait ses études de médecine à la célèbre université de Makerere. C’est un jeune médecin qui, à 26 ans, a rejoint la rébellion du FPR en 1990 à l’insu de ses parents. Sur le front, il était en charge des soins des soldats. En 1993, pour donner suite aux accords d’Arusha prévoyant l’intégration des soldats de l’Armée Patriotique Rwandais (APR) au sein de l’armée régulière, l’APR aligna les grades de ses soldats aux standards internationaux. Ainsi, le Dr Richard Sezibera fut promu au grade de Major comme la plupart des médecins qui avaient rejoint l’APR : le Dr Théogène Rudasingwa, le Dr Emmanuel Ndahiro ou encore le Dr Richard Masozera.
A la prise du pouvoir par le FPR, le Major Sezibera fut député représentant l’APR à l’Assemblée nationale de transition en 1995.
En 1997, il était porte-parole de l’APR. A ce titre, il était en première ligne dans les opérations contre les infiltrés Abacengezi. Les images de l’agence américaine Associated Press prises le 8 décembre 1997 dans l’ancienne commune de Kanama à Gisenyi, le montre devant les fameuses grottes de Nyakimana où plusieurs milliers de civils furent décimés par les troupes de l’APR ». Fin de l’extrait.
M Sezibera devrait savoir que les crimes qui ont été commis par son organisation sont considérés comme des crimes contre toute l’humanité , à ce propos il appartient à chaque être humain de l’interroger sur ces crimes au nom de l’universalité des valeurs humaines.

Si vous voulez en savoir plus sur comment l’Armée Patriotique Rwandaise (APR) a tué entre 5000 et 8000 civils qui s’étaient réfugiés dans les grottes de Nyakimana à Gisenyi (à ne pas confondre avec les grottes de Nyakinama à Ruhengeri) vous pouvez lire cet article : Nyakimana : après Kibeho, un autre « Srebrenica » au Rwanda.
Comme lui ces hauts cadres ou anciens cadres de l’Armée Patriotique Rwandaise devraient savoir que dans leur cas le silence n’est pas d’or car les crimes odieux qu’il ont commis sur le peuple rwandais ne sont pas imprescriptibles. Les faits sont têtus.
Alice Mutikeys
[1] https://www.jambonews.net/actualites/20190917-rwanda-richard-sezibera-ou-le-syndrome-ali-bongo/